Alors que la délégation de Nörse progressait vers le nord à travers les paysages glacés, Elyra se révélait être une compagnie agréable malgré les conditions difficiles. Son tempérament joyeux et curieux apportait une touche de légèreté à leur voyage, tandis que sa volonté affirmée faisait d'elle une présence rassurante pour les membres de la suite.

Elle s'intéressait aux us et coutumes des terres nordiques, posant des questions sur les traditions locales, la géographie du pays, et les habitudes des habitants. Elle observait avec fascination le changement progressif du paysage, de la verdure luxuriante de Forestcave aux vastes étendues enneigées du nord, et exprimait sa gratitude pour l'opportunité de découvrir de nouveaux horizons.

Malgré la distance qui les séparait de Forestcave et de sa sœur jumelle, Elyra restait résolue à embrasser son nouveau rôle en tant que future princesse de Nörse. Elle savait que des défis l'attendaient, mais elle était déterminée à les affronter avec courage et optimisme. Et tandis qu'ils avançaient à travers les terres gelées, elle se laissait emporter par la promesse d'un avenir inconnu, plein de possibilités et d'aventures.

Après plusieurs jours de voyage, ils avaient enfin passé la frontière et leur progression s'était vue ralentie par la neige. Aussi, la nuit était déjà tombée depuis quelques heures quand ils arrivèrent enfin en vu d'une auberge, mais la jeune fille, fourbue par le froid et le voyage ne s'était pas plainte une seule fois. Elle admirant les monts enneigés qui scintillaient sous l'éclat de la lune.

Aidée par Léoric à poser finalement pieds à terre, c'est avec soulagement qu'elle le suivit à l'intérieure, le laissant la guider de sa main délicate posée dans la sienne auprès de l'âtre durant que Valderic s'occuper de régler les détails de leur nouvelle halte avec l'aubergiste. Soulagée de pouvoir enfin se réchauffer après une journée de voyage difficile à travers les terres enneigées, elle apprécia la chaleur de l'endroit lui sembla accueillante, contrastant agréablement avec le froid glacial de l'extérieur.

Elle retira son manteau épais avec gratitude, se délectant de la sensation de chaleur qui envahissait ses membres engourdis. Son regard curieux balaya la salle de l'auberge, s'imprégnant de l'atmosphère animée de l'endroit. Elle remarqua les clients attablés, les flammes crépitantes dans la cheminée, et le doux murmure des conversations qui emplissait la pièce.

Se tournant vers le prince à ses côtés, elle lui adressa un sourire reconnaissant, reconnaissant pour sa compagnie et pour le réconfort de cet abri providentiel. Elle se sentait en sécurité à ses côtés, et sa présence était un réconfort bienvenu dans ce monde étranger et inhospitalier.

Lorsque les plats fumants leur furent servis, elle sentit son estomac gargouiller de faim. Elle accepta avec gratitude l'assiette qui lui était offerte, impatiente de savourer le plat traditionnel qui leur était présenté. La nourriture chaude et nourrissante était exactement ce dont elle avait besoin après une journée éprouvante.

Après plus d’une semaine de périple, Nörse était enfin à leur portée. Léoric n’avait pu se retenir de lancer sa monture au galop dans la neige pour franchir le col qui constituait la limite entre Aurora et le royaume de son père. Il se sentait à nouveau chez lui. Le froid était mordant, s’insinuant à travers l’épaisseur de leurs capes, se fixant sur leurs os. La neige impitoyable leur fouettait le visage, profitant d’un vent du Nord qui ne semblait pas prêt à se calmer. Léoric doutait pouvoir reprendre la route dès le lendemain.

Leur équipage fut particulièrement soulagé d’atteindre l’auberge qui les abriterait pour la nuit. Il aida sa fiancée à descendre de selle avant de la conduire à l’intérieur pour se réchauffer. C’est avec un certain plaisir qu’il avait pu constater l’enthousiasme d’Elyra. Celle-ci ne s’était pas plainte une seule fois des conditions particulièrement difficiles. La route était longue, elle ne connaissait que peu de membres de leur garnison, et pourtant elle avait eu un mot agréable pour chacun. Nul doute qu’elle serait très populaire auprès du peuple, mais aussi de sa famille. D’un geste habile, il l’aida à se défaire de sa cape avant de l’installer d’autorité près du feu veillant à ce qu’elle ne prenne pas froid. Lui-même tendit quelques instants ses mains gantées au-dessus du foyer, sa peau pâle légère rosit par le froid. Valderic se chargeait des détails, tandis que Théodoric était resté dehors pour s’occuper des chevaux et de payer grassement les palefreniers.

Ils furent bientôt réunis autour d’un bon repas chaud, un ragoût de sanglier accompagné de quelques pommes de terre et de carottes mijotées ; un peu de bière avait été demandée pour arroser le repas. Nörse n’était pas un pays de vin. Ils attaquèrent avec appétit, le ventre creusé par leur long périple. Dehors, la tempête faisait rage. Le vent soufflait et la neige tombait de plus en plus fort. Léoric leva le nez, regardant vers l’extérieur avant de lâcher : « Je crains que nous ne restions bloqués ici quelques temps. » Une pointe d’inquiétude perçait dans sa voix. Il ne voulait pas laisser son père plus longtemps seul, mais affronter une telle tempête était risquée. Il s’éclaircit la voix, demandant à sa fiancée : « Le repas vous plaît-il ? N’êtes-vous pas trop fatiguée ? » Le prince était attentif à ses moindres besoins et se souciait d’Elyra sans arrière-pensée. Il était un homme simple, bon et généreux malgré ses coups d’éclats. Durant le voyage, il s’était montré relativement raisonnable pour ne pas montrer ce mauvais côté à sa promise. Pourtant, l’envie ne lui manquait pas car ses compagnons de route pouvaient se montrer parfois indisciplinés. Il mâcha un morceau de sanglier, prit une gorgée de bière avant de poursuivre : « Cela ne vous dérange pas de partager votre chambre avec Erys une nouvelle fois ? Nous trouverons une autre solution à notre arrivée à Whitehall, mais pour le moment... » Il avait imposé cette protection à l’Ombre, dont la présence lui semblait encore parfois dérangeante. Néanmoins, il devait admettre que ses compétences étaient bien utiles.

Installée au plus proche du foyer répandant sur elle sa chaleur bienvenue, Elyra était attablée avec les trois princes quand Léoric fit remarquer qu'il serait sans doute plus prudent de ne pas braver davantage la tempête qui semblait profiter de la pénombre nocturne pour gagner en intensité. Il lui parut inquiet, aussi, sa jeune fiancée tendit une main douce pour la poser sur la sienne à travers la table afin de l'apaiser. Elle ne savait naturellement rien de la raison de ces préoccupations mais le savait pressé de rejoindre Whitehall, la demeure ancestrale de sa famille, et elle mettait cela sur le compte du mal du pays.

"Sauf erreur de ma part, nous arriverons bientôt votre Altesse..."

Malgré le lien qui les unissait et la familiarité régnant entre les trois frères, elle s'adressait toujours à eux avec un profond respect loin d'être feint. Elle appréciait les blague de Valderic qui ne manquait jamais l'occasion de faire le pitre et semblait même avoir percé un peu des défenses du benjamin de la fratrie de par sa bienveillance naturelle. Léoric quant à lui était attentif à ses moindres besoins, généreux et galant en toute occasion.

Lorsque l'on leur porta leur repas, elle commença à manger sans faire la difficile. Jusqu'à présent, il n'y avait que quand on lui avait servi du hareng qu'elle avait tiré une légère grimace mais elle ne faisait pas la fine bouche. Toutefois, la grande nouveauté de cette soirée pour elle était la bière. Elle qui ne buvait pas de vin et que peu d'alcool, découvrait cette nouvelle boisson avec curiosité ; c'était amer mais meilleur que le vin rouge des vignes de Luttange et ça accompagnait le repas qui leur été servi à la perfection.

"C'est délicieux, il faudra remercier la cuisinière qui se cache derrière se plat ! Et ne vous inquiétez pas pour moi, je fournis bien moins d'effort que ma monture."

Il est vrai que le jeune étalon semblait fatiguer depuis quelques jours et le passage du col l'avait éprouvait, il fallait dire qu'il n'avait jamais été autant sollicité que depuis leur départ. Heureusement, sa cavalière était légère et attentive, elle avait même posé pied à terre pour l'aider ou le rassurer quand s'était nécessaire, consciente qu'il était encore jeune et avait à apprendre et à s'endurcir.

Quand on lui demanda si elle acceptait de partager sa chambre avec Erys, elle savait parfaitement que c'était plus pour la forme que pour le fond puisqu'il avait déjà donné ses instructions en ce sens en confiant la charge de sa sécurité à l'ombre. Mais celle-ci ne la dérangeait nullement, c'était en outre un chaperon discret et Elyra appréciait sa compagnie et lui faisait confiance. Aussi, elle accepta dans un sourire sincère la demande du prince.

"Ne vous inquiétez nullement de cela, la compagnie de mademoiselle ne me dérange en aucune façon, je la trouve même rassurante."

Oui, rassurante. Après tout, quelle raison avait-elle de craindre quoi que ce soit puisqu'elle avait en amie l'une des créatures les plus craintes de la nuit ?

« Comme toujours, votre courtoisie vous honore mademoiselle Warcross. » fit Léoric, impressionné. À chaque fois qu’elle ouvrait la bouche, il adoptait cet air béat qu’on tous les jeunes gens amoureux. Lui ne l’avait été qu’une fois auparavant et il en reconnaissait tous les symptômes. Il savait que cela serait sujet à raillerie une fois que ses frères et lui seraient à l’abri de leurs appartements. Quant à Erys, et bien il pouvait apercevoir son sourire goguenard briller à l’autre bout de la table. Il lui décocha un regard noir avant de revenir à sa fiancée : « Je comprendrais simplement que sa présence vous soit pesante, vous aurez des dames de compagnies bien plus… adaptées une fois arrivée à Whitehall » fit-il simplement en s’emparant d’une miche de pain qu’il entreprenait de découper avec un couteau de chasse. Il lui en tendit une tranche avant de s’en découper une à son tour. Le prince héritier se resservit ensuite une rasade de bière, toujours inquiet à l’idée de ne pas pouvoir reprendre la route une fois le matin venu. Ils n’étaient plus qu’à deux, maximum trois jours de chevauchée, mais leur retard ne lui plaisait guère. Ils avaient déjà perdu assez de temps comme cela. Il hésitait presque à envoyer ses deux frères en avant, mais il ne voulait pas qu’ils se risquent sous la tempête. Même si Théodoric avait le tempérament d’un ours, il n’en avait pas encore la fourrure.

« J’ai grande hâte d’arriver au château et de vous faire découvrir votre nouvel environnement. Votre père possédait une belle collection de livres, mais à Whitehall, nous avons l’une des plus belles bibliothèques de Stormhold. Enfin, après la bibliothèque d’Hightower bien sûr… » Les ouvrages ne portaient évidemment pas sur les mêmes sujets. Et ils possédaient des reliques des premiers royaumes, gravés sur des feuilles de velin. Et s’il n’était pas un grand lecteur, il n’ignorait pas que sa future épouse révérait les livres. Il pensait que cette information lui serait réconfortante.

Elyna avait surpris du coin de l’œil Valderic, assis à ses côtés, en train d'imiter son frère aîné avec une série de grimaces exagérées. Elle lui arracha un sourire complice en lui donnant un petit coup de pied sous la table, comme elle aurait fait avec un grand frère taquin. Lorsque Valderic chercha le coupable du regard autour de la tablée, il finit par rencontrer le regard innocent d'Elyna, qui lui adressa un sourire malicieux. Il comprit aussitôt que c'était elle l'instigatrice de cette petite farce, et il lui rendit son sourire avec complicité. Il se dit qu'elle était vraiment parfaite, parfaitement adaptée au caractère tempétueux de Léoric : douce et patiente, mais aussi capable d'humour et de bienveillance.

Pendant ce temps, Elyna avait repris son repas comme si de rien n'était, souriant à Léoric avec douceur pour le rassurer, et lui répondant d'une voix calme et posée :

"Sa présence ne me dérange en rien, c'est une compagne tout à fait charmante quand on la connaît."

Elle tourna ensuite son regard vers l'ombre, lui adressant un sourire sincère. Bien qu'Erys fût assignée à sa sécurité, Elyna avait développé une relation de confiance avec elle au fil du temps, appréciant sa compagnie discrète mais réconfortante.

Elle remercia Léoric lorsqu'il lui servit une tranche de pain, et se montra enthousiaste quand il lui parla de la bibliothèque du palais de Whitehall, renommée pour ses trésors littéraires et ses secrets ancestraux. Elle avait hâte de les découvrir et de percer tous les mystères de la cité des glaces.

"J'espère que votre Altesse me guidera pour découvrir toutes les merveilles et tous les secrets de votre demeure, qui fut après tout dessinée par la reine Olara en personne."

Elle évoquait ainsi les nombreuses légendes autour des passages secrets et des corridors cachés que renfermait le palais ancestral de Whitehall, imaginé par la légendaire reine Olara. Sans le savoir, elle faisait référence à un passage secret proche de l'auberge où ils se trouvaient, une information que Valderic retint immédiatement. Cela pourrait leur permettre de contourner la tempête de neige et d'arriver au palais en toute discrétion. Si leurs ennemis pensaient les piéger dans la neige, ils seraient pris au dépourvu en les voyant apparaître à l'improviste.

Léoric avait pleinement conscience des moqueries de son cadet, celui-ci ayant la discrétion d’un ours dans un atelier de potier (et probablement une pomme de terre bouillie à la place du cerveau). Il s’empourpra un bref instant avant de reprendre contenance, faisant mine d’ignorer Valderic qui – soudainement – arrêta son petit manège. Il bénit silencieusement celui qui venait de le rappeler à l’ordre, sans doute Théodoric dont l’air habituellement grave, s’éclairait d’une étincelle amusée dans le regard. Le prince héritier se concentra à nouveau sur sa chère fiancée dont la bonne humeur et l’optimisme était contagieux. Personne ne pouvait la détester, il en était désormais intimement convaincu. Elle mettait tant d’énergie à créer du lien entre chacun des membres de leur expédition qu’elle en était devenue le cœur, parfois même la voix. Léoric se sentait fier et surtout chanceux qu’elle accepte de l’épouser, malgré les circonstances de leur rencontre.

Le jeune homme fut quelque peu surpris de l’entendre aborder le sujet des passages secrets de Whitehall. Cette information n’était pas connue de tous et ils tâchaient de ne pas l’ébruiter. C’était à la fois d’une grande praticité, mais aussi un défaut de sécurité pour quiconque était capable d’aller fouiner dans les archives. Il s’éclaircit maladroitement la voix :

« En effet, la reine Olara a été la conceptrice du château de Whitehall. Avant, les Warflame régnaient dans des halles de bois et leur pouvoir était… toujours plus ou moins menacé par des chefs de clan ambitieux et fourbes. Fort heureusement ces temps troublés sont révolus. » fit-il en glissant un regard à Valderic avant de poursuivre : « Dans tous les cas, nous vous montrerons tout cela en temps voulu. Les secrets du château sont une affaire de famille. »

Et tant qu’Elyra n’était pas sa femme, il préférait garder cela pour lui. Il n’était même pas certain de tous les connaître. Le souvenir de certains tunnels avait été oubliés au fil du temps ; d’autres bouchés pour des questions de praticité ou d’économie de chaleur. Nul doute que cela plairait à sa fiancée de voir que la bibliothèque permettait de desservir secrètement presque toutes les pièces les plus importantes du palais. Après tout, Olara était une érudite. C’était à se demander pourquoi elle avait épousé un Warflame, qui n’était pas réputés pour leurs grandes capacités intellectuelle.

Elyra avait toujours été fascinée par les mystères et les secrets, et la perspective d'explorer les passages secrets de Whitehall lui semblait particulièrement excitante. Elle se rappelait avoir découvert l'existence de ces passages dans l'un des nombreux ouvrages de la bibliothèque de son père, et depuis, elle était obsédée par l'idée de percer leurs mystères. Même si elle n'avait réussi à glaner qu'une maigre information sur ces passages, elle était convaincue qu'ils représentaient bien plus qu'une simple curiosité architecturale.

Pendant que Léoric partageait l'histoire de sa famille et de Whitehall, Elyra l'écoutait avec une attention soutenue, captivée par chaque détail. Bien qu'elle ait été un peu déçue que Léoric ne la considère pas encore comme faisant pleinement partie de leur famille, elle comprenait sa réserve quant aux secrets bien gardés du palais des neiges. Elle lui adressa un sourire compréhensif, exprimant sa patience et son respect pour la tradition et les mystères de leur lignée :

"Je comprends parfaitement, oui... En temps voulu."

Bien qu'elle soit avide de découvrir tous les secrets de Whitehall, elle était prête à attendre le moment propice pour explorer pleinement ces mystères. Peut-être ne les connaîtrait-elle jamais tous, mais cela ne faisait que stimuler davantage sa curiosité et son imagination débordante. Elle se sentait déjà impatiente de commencer cette nouvelle aventure, mais la fatigue commençait à se faire sentir. Alors, rassasiée malgré le fait qu'elle n'ait pas terminé son assiette, elle laissa échapper un bâillement involontaire, s'empressant de s'excuser aussitôt.

"Sans doute devrais-je me retirer pour la nuit. Avec un peu de chance, la tempête s'apaisera dans la nuit et nous pourrons alors reprendre notre route."

Sur ces quelques paroles, elle se leva pour s'incliner profondément devant les trois princes, adressant un sourire à son fiancé. La journée avait été longue et fatigante, et bien qu'elle ne se plaigne jamais, elle se sentait épuisée par le voyage.